L’escalade est-elle devenue un sport d’intérieur, avec le boom des salles et l’effet Jeux olympiques ?

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[...] • Un jeudi sur deux, dans sa rubrique « hors-terrain », 20 Minutes explore de nouveaux espaces d’expression du sport, inattendus, insolites, astucieux ou en plein essor. • Cette semaine, nous nous consacrons à la pratique de l’escalade en salle, sport en vogue absolu en France depuis une dizaine d’années, et qui présente son salon du 18 au 20 novembre à Grenoble. • Entre la présence de 200 salles dans toute la France, pour environ 2 millions de pratiquants, et l’arrivée de la discipline aux derniers Jeux olympiques, l’escalade devient-elle définitivement un sport d'intérieur ? A l’occasion des dix ans de sa disparition, Patrick Edlinger se verra consacrer une exposition photographique lors du salon de l'escalade , la semaine prochaine à Grenoble. Cet emblématique pionnier français de l’escalade libre de haut niveau, dans les années 1980, n’aurait sans doute pas imaginé l’évolution foudroyante que vient de connaître sa discipline. Des structures artificielles d’escalade (SAE) poussaient bien dans nos gymnases dès la fin des années 1970, surtout à destination du public scolaire. [...] Lycéenne dans la région strasbourgeoise, June (15 ans) explique ce qui la pousse à pratiquer 8 heures par semaine l’escalade en salle : « J’aime me retrouver seule face à ma voie. Ça me déconnecte vraiment du monde extérieur et de mes soucis. L’ambiance est également super à la salle : on trouve tous les âges et on parle avec tout le monde ». Les adolescents « urbains » comme June ont toujours vécu en France avec une salle d’escalade à proximité, et ils ne ressentent pas forcément l’envie de partir à l’aventure, en quête de falaises. Cette évolution de la discipline, totalement inattendue à la fin du XXe siècle, nous pousse à une question : l’escalade est-elle devenue un sport d'intérieur ? Le Lyonnais Jean (41 ans), qui part quasiment chaque week-end grimper dans la nature, que ce soit dans le Vercors, la Drôme ou le Vaucluse, a son avis sur la question. Je comprends que certains ont peur à l’idée de franchir ce cap de sortir de la salle. Ça implique beaucoup plus de logistique, d’avoir son véhicule, et d’y passer la journée. Mais selon moi, l’escalade reste un sport de nature. C’est un prétexte à l’évasion qui a sur mon mode de vie citadin un effet régénérant. J’ai besoin de découvrir différentes roches, et de ne pas me contenter de ces mêmes prises de résine qu’on a en salle. C’est sûr que le sport en vogue est avant tout l’escalade en indoor, mais je constate que la pratique est grandissante aussi en falaise. » [...] C’est en partie pour éviter des dérives organisationnelles et environnementales que les grandes compétitions d’escalade ont très tôt migré de la falaise à la salle, après un fiasco en 1986 au Biot (Haute-Savoie). « Avec mon frère Bassa, on a aussi profité de la falaise dans notre pratique loisir, indique Mickaël Mawem. Mais quand on a décidé de se mettre vraiment à la compétition, les choses étaient simples : toutes les compets sont en salle, donc on s’entraîne en salle. » Quel effet JO sur la pratique ? Hormis de rares exemples comme le Tchèque Adam Ondra, un « falaisiste » pur et dur devenu champion du monde en salle, le très haut niveau en compétition ne se compose presque plus que de grimpeurs indoor. Et si la résonance XXL des Jeux olympiques d’été, qui présenteront pour la deuxième fois 100 % des épreuves d’escalade (vitesse, bloc et difficulté) en salle, à Paris en 2024, faisait définitivement basculer la pratique vers l’indoor ? Non, ce ne sera pas encore le cas selon moi, répond Mickaël Mawem. La présence de l'escalade aux Jeux olympiques est trop jeune pour qu’il y ait cette évolution-là. Il y a deux mondes bien à part dans l’escalade mais grâce aux salles, la discipline perdure aussi en extérieur. Car même en ville, sur dix personnes qui commencent à pratiquer, il y en a une ou deux qui vont s’essayer un jour à l’extérieur, et peut-être même devenir adeptes. La pratique reste beaucoup liée à notre environnement. Autour de Paris, il n’y a pas de falaise, donc les gens auront moins de facilités à découvrir la discipline en extérieur que dans la région de Grenoble, où ils sont nés dans les montagnes. » salon de l'escalade s'est déroulé à Lyon. La troisième édition va cette fois avoir lieu la semaine prochaine à Grenoble." L'an passé, le deuxième salon de l'escalade s'est déroulé à Lyon. La troisième édition va cette fois avoir lieu la semaine prochaine à Grenoble. - Damien Largeron Organisateur du troisième salon de l'escalade , du 18 au 20 novembre à Grenoble (après Lyon en 2019 et 2021), Eric Hatesse (42 ans) compte sur ce rendez-vous une centaine d’exposants supplémentaires par rapport à l’an passé. Il espère attirer environ 5.000 visiteurs à Alpexpo. Lui aussi croit en une atypique diversité des publics : « Il y a un éventail de grimpeurs très large, avec une pluralité de profils allant du grimpeur sur glace à celui sur paroi vierge, en passant par ceux qui font à mort du bloc, ou au contraire que de la vitesse. Ce sport est en pleine évolution et il se cherche encore ». Il n’a en tout cas jamais autant fait parler de lui qu’actuellement.

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